dimanche 31 mai 2015

Rapport 2014 sur le développement en Afrique

L’intégration régionale au service de la croissance inclusive


L’intégration régionale de l’Afrique est une aspiration majeure, tant économique que politique, depuis les indépendances dans les années 1960 – il y a une cinquantaine d’années. C’est également un pilier important sur lequel se fonde le travail de la Banque africaine de développement (BAD), qui célèbre son 50e anniversaire en cette année 2014, et désormais première institution financière de développement du continent.
Voilà pourquoi il est opportun, dans ce Rapport 2014 sur le développement en Afrique, d’examiner de nouveau l’impérieuse nécessité de l’intégration pour que se poursuive le développement du continent africain : étudier ce qui a changé, en termes d’arguments et d’actions sur le terrain au cours du demi-siècle écoulé ; et en quoi poursuivre une intégration économique et politique plus intense est toujours d’actualité pour le continent.
Le Rapport compte six chapitres. Y sont traités la pertinence de l’intégration régionale dans un monde en pleine mutation ; l’importance et le rôle des communautés économiques régionales (CER) ; l’impact des infrastructures régionales ; les enjeux de la migration interrégionale des facteurs de production, notamment la main d’œuvre ; l’intégration financière régionale et les plateformes nécessaires pour que celle-ci ait un vrai impact sur le commerce régional et la croissance économique ; et de quelles façons intégrer au mieux l’Afrique à la production et aux échanges mondiaux via les chaînes de valeur régionales.
Le Rapport aboutit à cette conclusion : le contexte international a beau avoir fortement changé depuis qu’a été fixé l’objectif continental dans les années 1960, l’intégration régionale demeure un pilier du développement de l’Afrique. Le défi auquel nous sommes confrontés désormais n’est pas tant d’élaborer de nouvelles politiques, mais plutôt de mettre en œuvre celles qui ont déjà été formulées ces dernières années. Ce qui nécessite plus de volonté politique et des capacités institutionnelles accrues.
Les arguments politiques et les messages majeurs du Rapport sont les suivants :
  • L’appartenance des pays africains à plusieurs communautés économiques régionales n’est pas un obstacle majeur à l’avancement du programme d’intégration. Disposer de structures formelles fonctionnelles qui garantissent que les relations régionales prennent tout leur sens est autrement plus crucial. Pour que les CER mènent des politiques d’intégration régionale inclusive, les États membres doivent davantage s’engager dans leur mise en œuvre à l’échelle nationale.
  • Les pays africains doivent être mieux connectés entre eux, par routes, par rail, grâce aux TIC, par les réseaux électriques et les ports. Mais le développement des infrastructures régionales ne stimule une croissance inclusive que s’il crée des emplois productifs, atténue la pauvreté et réduit les inégalités.
  • Il faudrait encourager une approche fondée sur une « coalition de volontaires » pour que progresse la gestion des migrations régionales, plutôt qu’une approche qui s’appuie sur un simple contrôle de l’immigration. Les CER devraient reconnaître les diplômes à une échelle régionale, encourager une mutualisation régionale des compétences et coordonner les quotas annuels d’immigration en fonction des besoins en compétences des marchés du travail nationaux respectifs. De plus, les politiques régionales devraient garantir aux migrants un accès équitable à des services publics de qualité en matière de santé et d’éducation, comme une clause à part entière. Réduire les coûts de transferts de fonds ouvrirait également de nouvelles perspectives pour les économies bénéficiaires et tous ceux restés au pays.
  • Développer les activités bancaires transfrontières, les marchés de capitaux et les autres infrastructures financières régionales en Afrique pourrait entraîner les économies d’échelle que requiert l’essor économique. Cela nécessite un environnement économique stable et l’utilisation de normes rigoureuses qui n’entravent pas pour autant la capacité des institutions à innover et à répondre aux besoins des plus défavorisés.
Les entreprises sont désormais en quête d’avantages comparatifs dans des niches qui ne fournissent qu’en partie seulement la demande mondiale en biens et services. A la faveur de la forte croissance récente de l’Afrique, les entreprises locales ont vu émerger des opportunités pour accroître leur offre de matières premières dans les chaînes d’approvisionnement régionales de commerce de détail et de commerce alimentaire. La croissance des échanges génère, à son tour, des emplois au niveau national. Les chaînes de valeur régionales peuvent se muer en voie royale pour la croissance inclusive en Afrique.

L'AGRICULTURE AFRICAINE

L'agriculture africaine

L’Afrique possède une grande variété de zones agro-écologiques, qui vont des forêts ombrophiles marquées par deux saisons des pluies à une végétation relativement clairsemée, sèche et aride, arrosée une fois l’an. Si cette diversité constitue un énorme atout, elle représente tout de même un grand défi pour le développement agricole de l’Afrique.
D’une part, elle offre un immense potentiel en termes de denrées et produits agricoles susceptibles d’être produits et commercialisés sur les marchés intérieurs et extérieurs. D’autre part, cette diversité exclut toute solution générale aux problèmes que pose le développement agricole sur l’ensemble du continent. Par conséquent, la programmation et la mise en œuvre d’interventions dans ce secteur doivent être adaptées aux conditions propres à chaque zone agro-écologique et à la situation socioéconomique des ménages ruraux vivant dans les différents pays du continent.
Au cours des trois dernières décennies, les gains de productivité agricole en Afrique ont été obtenus dans une large mesure par une expansion continue des cultures pluviales, en particulier, les cultures vivrières, sur des terres de plus en plus marginales et/ou par la réduction des périodes traditionnelles de jachère entre deux cycles de culture.
Soumis à la forte pression démographique, les ménages ruraux ont été contraints d’adopter des pratiques agricoles qui assurent leur survie. Malheureusement, les stratégies de sécurité alimentaire des ménages n’ont pas accordé beaucoup d’importance à l’accroissement de la productivité des exploitations agricoles par l’intensification du rendement par parcelle de terre cultivée – c’est-à-dire par l’accroissement du rendement des cultures à l’hectare.
Hormis l’agriculture commerciale qui couvre une gamme relativement restreinte de cultures, l’utilisation d’intrants agricoles – c’est-à-dire de semences améliorées, d’engrais inorganiques, d’insecticides et de pesticides – est nettement moins répandue en Afrique que dans les autres régions en développement du monde. Souvent, la quantité d’engrais inorganique utilisée à l’hectare est inférieure à dix kilogrammes de nutriments. Pour l’heure, l’utilisation des produits agrochimiques et/ou de techniques de lutte intégrée contre les maladies végétales et les parasites reste largement limitée aux cultures d’exportation.
L’expansion continue des cultures s’est faite aux dépens des autres systèmes d’utilisation des ressources naturelles. L’une des conséquences de ce phénomène a été la destruction rapide des ressources forestières par le défrichement et la surexploitation des terres aux fins de production de bois de feu et d’autres utilisations domestiques. Un autre effet plus subtil de cette situation est la détérioration des systèmes de transhumance du bétail, provoquée par l’utilisation à des fins de culture de superficies de plus en plus étendues de terres autrefois réservées au pâturage de saison sèche.
La surexploitation des ressources halieutiques constitue un problème grave quand les ressources communautaires sont exploitées pour générer des profits personnels. L’absence de dispositions réglementaires appropriées et, lorsqu’elles existent, leur mauvaise application, ont eu pour conséquence directe la baisse actuelle du volume des prises et compromettent sérieusement les chances d’une reconstitution suffisante des stocks de poisson à l’avenir.

samedi 30 mai 2015

PRESENTATION DE L'AFRIQUE

Continent D'Amour et de Richesse!

L'Afrique couvre environ 30 300 000 kilomètres carrés et comptait, en 2012, plus d'un milliard d'habitants. Située entre 370 21' de latitude nord et 340 51' de latitude sud, elle est comprise pour l'essentiel dans la zone tropicale, et se partage entre zones à climats chauds et secs sous les tropiques, et zones à climats chauds et humides sous l'équateur. Les régions tempérées (méditerranéennes) n'occupent que deux marges étroites, à ses extrémités nord et sud. La masse continentale est inégalement répartie. Dans l'hémisphère Nord, à la latitude du Ras Caseyr (cap Guardafui) en Somalie, l'Afrique s'étend d'ouest en est, sur près de 7 500 kilomètres : c'est presque autant que du nord au sud (8 050 km) et deux fois plus qu'aux latitudes équatoriales. Les effets de la continentalité (températures extrêmes, aridité) s'exercent avec le maximum d'intensité au Sahara, le plus grand désert chaud du monde, prolongé à l'est par la diagonale aride qui s'étend de la péninsule arabique aux déserts iraniens. En Afrique australe au contraire, la relative proximité des océans Atlantique et Indien atténue la continentalité ; le modèle climatique zonal y est moins net que dans l'hémisphère Nord.
Le continent africain, à peine séparé de l'Europe par le détroit de Gibraltar (14 km) et accroché à l'Asie par l'isthme de Suez, est depuis longtemps en contact avec les civilisations méditerranéennes et moyen-orientales. La mer Rouge et la Méditerranée ont été porteuses d'échanges entre les trois continents. Pourtant, une grande partie de l'Afrique dite subsaharienne a longtemps vécu isolée du reste du monde.
Cet isolement tient d'abord à la configuration physique du continent, en premier lieu à l'obstacle que l'immense Sahara oppose au déplacement des hommes. Il n'en a certes pas toujours été ainsi. La préhistoire et les gravures rupestres attestent de la réalité des échanges transsahariens avant le début de l'actuelle phase aride, voici environ 3 500 ans. Jusqu'à une époque très récente, la traversée du désert était une épreuve. Le commerce caravanier n'en a pas moins maintenu des liens entre la Méditerranée et le bled es soudan, ce pays des Noirs qu'on atteignait après avoir franchi le sahel, c'est-à-dire le rivage, celui du désert, selon les premières représentations géographiques établies par les Arabes. Commerçants, ceux-ci furent en même temps propagateurs de l'islam, démontrant la perméabilité du désert, du moins sur le plan religieux, car aucune des avancées technologiques des civilisations euro-asiatiques, notamment la roue et l'attelage, ne franchit le Sahara. L'Égypte elle-même ne fut pas un foyer de diffusion vers l'Afrique noire des techniques qu'elle maîtrisa précocement. Les cataractes fractionnant le Nil, l'obstacle des marais du Bahr el-Ghazal succédant à ceux du désert, les risques à voyager dans des régions où régnaient de redoutables systèmes pathogènes (paludisme, maladie du sommeil, fièvre jaune) ne permirent pas au plus long fleuve d'Afrique d'établir un lien effectif entre les civilisations méditerranéennes et l'Afrique tropicale.
Autre obstacle : la massivité d'un continent aux côtes rectilignes peu hospitalières et sans voies naturelles de pénétration. L'Afrique ne compte que 30 500 kilomètres de côtes, et assez peu de sites d'abri. Les fleuves, souvent entrecoupés dans leur cours inférieur par des chutes et des rapides, comme c'est le cas du Congo, n'ont pas aidé à l'ouverture de l'intérieur d'un continent resté, pour les Européens, terra incognita jusqu'aux explorations de la seconde moitié du XIXe siècle. Enfin, dans les régions équatoriales, la forêt elle-même contribua à confiner les populations dans des micro-espaces et opposa longtemps son opacité à sa pénétration.
L'ouverture de l'Afrique noire au monde s'est faite en plusieurs temps. Les relations avec la Méditerranée et le Moyen-Orient connurent une inflexion majeure à partir duVIIIe siècle, avec l'expansion de l'islam sur les deux fronts du Sahel et du littoral de l'océan Indien (cet autre sahel qui a donné son nom au monde swahili). Mais l'islam ne progressa pas au-delà des savanes de l'hémisphère Nord et des régions côtières et insulaires (Zanzibar, Comores) de la façade orientale du continent. La fin duXVe siècle, marquée par les découvertes maritimes pionnières des Portugais (Bartolomeu Dias atteint le cap des Tempêtes, qui deviendra le cap de Bonne-Espérance, en 1488), aurait pu préluder à l'établissement de nouveaux liens avec l'Europe. La première mondialisation, en focalisant les intérêts européens sur le Nouveau Monde, en décida autrement. Dès le XVIe siècle, un système mondial se met en place dans lequel l'Europe place l'Afrique noire au service des Amériques : prenant à leur compte la tradition de la traite esclavagiste dans laquelle les Arabes jouaient alors le premier rôle, les Européens organisèrent la déportation de millions de Noirs dans le cadre du trafic triangulaire qui fonctionna jusqu'au XIXe siècle. Ils se contentèrent d'une présence sporadique sur les côtes sans chercher à pénétrer vers l'intérieur, les Africains se chargeant eux-mêmes de livrer les esclaves aux négriers.
Le dernier temps, décisif pour le présent et le futur de l'Afrique, fut la colonisation. Au-delà des traumatismes qu'elle a provoqués, elle précipita l'Afrique dans la modernité, télescopant brutalement les temporalités. Les bouleversements économiques et sociaux, démographiques, spatiaux, politiques et culturels se sont déroulés sur un rythme tellement rapide qu'ils pouvaient difficilement faire l'économie de crises graves. La création, le plus souvent ex nihilo, des États (aujourd'hui au nombre de 54 en comptant les États insulaires), constitue un legs majeur de la colonisation, mais les nouveaux pouvoirs éprouvent de grandes difficultés à gérer pacifiquement l'héritage territorial et politique comme en témoigne la récurrence des guerres civiles.
Si tous les États africains ont accédé à l'indépendance politique (dernier en date, le Soudan du Sud en 2011), la dépendance économique reste en revanche très forte dans le continent le plus touché par les maux du sous-développement. Selon l'indicateur de développement humain (I.D.H.) établi par le Programme des Nations unies pour le développement (P.N.U.D.), l'Afrique occupe le bas du tableau avec un grand nombre de pays d'Afrique subsaharienne situés parmi les pays les plus mal classés. Les sécheresses qui sévissent depuis les années 1970 ont leur part de responsabilité, tout comme une démographie galopante qui remet en cause les équilibres population/ressources, mais les difficultés structurelles de l'Afrique que traduisent les famines, les crises de société, les guerres ont des causes fondamentalement politiques.